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Les finisseurs !

Ce soir je serai un sagard !

Récit de Vincent LOUIS, sagard en 25 h 29 min, le 20 août 2023

Les sagards, ces laborieux ouvriers des scieries du massif des Vosges, ont disparu de nos montagnes il y a quelques dĂ©cennies. Mais les routes qu’ils arpentaient autrefois sont toujours lĂ  et, au fond de la forĂȘt, rĂ©sonnent encore leurs voix. À l’image de ces travailleurs infatigables, celui qui s’aventurera sur la route des Sagards devra rivaliser d’endurance et de force, de prudence et d’audace pour achever son Ɠuvre et laisser, une bonne fois pour toutes, son empreinte sur la route.
Un parcours hors des routes ordinaires, une aventure au cƓur de la forĂȘt vosgienne.
98 % route / 2 % gravel

La prĂ©sentation donne le ton, ca sent le sapin cette affaire, et ça ça me plaĂźt bien. Vadrouiller en vĂ©lo, parcourir les cols de mon enfance et plus, dĂ©couvrir les routes cachĂ©es de mes forĂȘts tant aimĂ©es sont autant de choses qui me motivent. Elles donnent en fait un prĂ©texte Ă  une sortie folle, qui va m’obliger Ă  sortir de ma zone de confort et Ă  repousser mes propres limites.

Ma sortie la plus longue je m’en souviens bien. C’Ă©tait un direct Strasbourg-Nancy par le canal de la Marne-au-Rhin, 175 km qui avait fini au coeur d’une fĂȘte foraine de village, en fringale devant le stand de sucreries.

Aujourd’hui si ces mauvais souvenirs sont derriĂšre, cette nouvelle aventure qui s’offre Ă  moi m’effraie pour d’autres raisons : l’inconnue de la distance, de la rĂ©action de mon corps vis-Ă -vis de l’effort et du temps Ă  passer sur le vĂ©lo, le fait de rouler de nuit, l’alimentation et l’hydratation, la mĂ©tĂ©o instable des derniĂšres semaines.

Je dĂ©cide de partir ce vendredi 18 aoĂ»t Ă  la premiĂšre heure. Il est 00h46 et je pars avec l’intention de rentrer me coucher dans la nuit prochaine. Je ne sais pas ce que je vaux sur une distance aussi longue, mais au fond de moi je sais que j’en suis capable et comme d’habitude, je n’ai pas envie de m’attarder, mĂȘme si cette affaire en vaut la peine.

Au dĂ©part d’Epinal, la gueule dans le ***, il ne fait pas si froid que cela. Si les 20 premiers kilomĂštres me servent de rĂ©veil, les 20% de la montĂ©e des Cuveaux me donnent le premier coup de chaud de la journĂ©e. Et pourtant il fait encore nuit. Les tempĂ©ratures sont inversĂ©es, il fait lourd sur les hauts et frais dans les fonds de vallĂ©es. Si les prochains cols me font regretter la sous-couche, les descentes quant Ă  elles me donnent raison de m’ĂȘtre habillĂ© chaudement pour le dĂ©part.

J’arrive Ă  Saulxures Ă  5h00, mon village d’enfance. Les premiĂšres gourdes ont Ă©tĂ© rechargĂ©es, la tĂȘte et les jambes bien rĂ©veillĂ©es, le rythme est donnĂ©. J’avance en profitant des routes forestiĂšres que je connais par coeur, ou presque. Le col de la Sure aprĂšs Morbieux est en effet une premiĂšre dĂ©couverte. Chevreuils, renards et blaireaux m’observent avancer lentement alors que le soleil se lĂšve. Je serai en Haute SaĂŽne au levĂ© du jour, avec dĂ©jĂ  100 bornes dans les pattes.

A Servance, il est encore trop tĂŽt pour croissant trouver. Mes sacoches pleines de victuailles font l’affaire, je continue en autonomie vers les profondes vallĂ©es de Miellin. LĂ  les scieries et les cadres des hauts fers rĂ©sonnent encore. Si le contexte est d’une profonde authenticitĂ©, et d’un charme qui sent la rĂ©sine, les pentes des 3 montĂ©es qui suivent me scient les jambes. C’est la premiĂšre fois depuis le dĂ©but de la virĂ©e que j’en bave. Et sur ces routes oĂč les rĂ©cents abbatages et orages rendent le revĂȘtement particuliĂšrement scabreux mon accolyte Ă  2 roues souffre lui aussi

Une pause s’impose. A Saint-Maurice-sur-Moselle la premiĂšre boulangerie m’offre l’occasion de me faire pĂ©ter la panse -pardon- de me ravitailler. A Bussang le soleil commence Ă  chauffer, mais aprĂšs m’ĂȘtre refait une santĂ©e, il est temps de tourner la page. Je grimpe le col du Page Ă  un rythme rĂ©gulier, idem pour la montĂ©e de la Chaume du Grand Ventron.

A Bramont c’est Pierre qui me rejoint. Le voilĂ  qui arrive, la pĂ©dale agitĂ©e, entre 2 motos. ParĂ©s pour la bascule, nous partons vers l’Alsace et profitons de la descente pour partager mes premiĂšres rencontres sauvages (je parle aussi bien du gibier que des cols sanglants haut-saĂŽnois). Le fond de vallĂ©e de Kruth Ă  Saint Amarin est plat, mais autour de nous les bosses s’Ă©lĂšvent et celle que nous entamons est abrupte. La montĂ©e jusqu’Ă  Geishouse annonce les prochaines heures. Des pentes continues et longues en plein soleil, mais des paysages de toute beautĂ©.

Le temps passe et nous nous arrivons Ă  Munster. J’ai l’impression que nous n’avons pas avancĂ© : il est presque 18h et j’ai seulement passĂ© les 250km alors que j’en avais 180 quand nous nous sommes retrouvĂ©s Ă  Bramont. Pierre dĂ©cide finalement de me laisser aprĂšs une Ă©niĂšme bifurcation surprise vers une rampe peu accueillante au dessus de Stosswihr. Je ne tarde pas et me remet Ă  scier le rythme rĂ©gulier, sur les pentes du Wettstein. Je me suis donnĂ© l’objectif de passer le dĂ©filĂ© de Straiture avant la tombĂ©e de la nuit. Cette vallĂ©e encaissĂ©e ne me donne pas envie d’y rester la nuit, et le passage Ă  GĂ©rardmer reprĂ©sente pour moi presque une ligne d’arrivĂ©e car je sais que la suite roulera.

Avant cela, il me faut encore rejoindre le Bonhomme. Quelques coups de scie aux Hautes Huttes, et sur la route du Lac Blanc pour redonner du rythme, me permettent d’atteindre la descente du prĂ©s de Rave alors que le jour se couche. J’ai en tĂȘte d’ĂȘtre Ă  Ban sur Meurthe dans la prochaine demi heure.

Mais c’est ici que le plus dur commence. Les kilomĂštres passent et les vallons dĂ©filent. La trace monte, redescend, on pense en finir et Ă  chaque fois un coup de cul revient, quand ce n’est un chemin accidentĂ© qui nous ralentit. A proximitĂ© de Plainfaing, le mental est au plus bas, comme le soleil et comme mon pneu. Je viens de crever. Je rĂ©pare, allume mes lampes et continue, tĂȘte baissĂ©e, rĂ©signĂ©, sur les routes de Ban sur Meurthe, sur toute les routes de Ban sur Meurthe mĂȘme. Car ici la trace fait les 4 coins de la vallĂ©e. Quand on pense arriver en haut, la trace redescend, puis remonte, puis croise la vallĂ©e, pui remonte, puis remonte, pour enfin nous rapprocher de Xonrupt.

Il fait nuit et une bosse me sĂ©pare de GĂ©rardmer. Le mental fera tout dans cette montĂ©e, pas de sentiment, mais des jambes qui veulent en finir. La pente est rĂ©guliĂšre mais longue, et lorsque les rues du centre ville gĂ©rĂŽmois s’offrent Ă  moi, c’est mes lampes qui me lĂąchent. La montĂ©e de LiĂ©zey se fait au flash et la suite n’est que sciage sur des profils roulants. Je ne traĂźne pas, il est 00h00 et j’ai hĂąte d’en finir.

Mes batteries de lampes rechargĂ©es, je descends vers Saint-Jean-du-MarchĂ© quand un flash clignote au loin. C’est Romain, il m’attend en vĂ©lo pour m’accompagner jusqu’Ă  Epinal. Je ne sais pas comment il m’a retrouvĂ© lĂ , mais la surprise et bonne et la fin passe de ce fait rapidement, et de bonne maniĂšre. Je suis dĂ©tendu, les muscles rĂ©pondent encore bien, mĂȘme si les genoux commencent un peu Ă  fatiguer.

Il est 2h15, il fait aussi bon qu’hier matin Ă  la mĂȘme heure, et me revoilĂ  Ă  Epinal.

J’ai parcouru 411km, grimpĂ© 9 683m, j’ai sciĂ© pendant 25h29 et ce soir je suis un sagard.

Merci Ă  Simon Remy pour ce beau dĂ©fi qu’est La Route des Sagards

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Aline et Sarah, premiĂšres Sagardes

La Route des Sagards !

Je mets des majuscules parce-qu’elle mĂ©rite bien ça…

L’idĂ©e a germĂ© il y a plusieurs mois dans la tĂȘte de Sarah Vieuille. N’ayant pas rĂ©ussi Ă  nous caler cette aventure ensemble, nous nous apprĂȘtions Ă  nous lancer sĂ©parĂ©ment :

  • Sarah en septembre avec une amie, sur 3 jours.
  • et moi la semaine du 7 au 11 aoĂ»t (dĂ©cidĂ© dĂ©but aoĂ»t !) avec Marin Pogeux en “un minimum de temps”.

À la grande surprise de Marine qui me connait bien et qui sait que je ne suis pas fan de dormir sur un tas de cailloux, je lui ai proposĂ© de partir Ă  l’aventure sans rien rĂ©server, de rouler jusqu’Ă  n’en plus pouvoir et de s’adapter aux besoins avec les moyens du bord … les routes forestiĂšres vosgiennes ont bien des abris Ă  disposition pour dormir quelques dizaines de minutes par-ci par-lĂ , non … ?

VoilĂ  donc dans quel Ă©tat d’esprit j’Ă©tais 😏

Loin de ce que j’avais dĂ©jĂ  connu et vĂ©cu sur les routes du Tour de France lors de ces cinq derniĂšres annĂ©es, oĂč nous endurions certes de longues journĂ©es sur le vĂ©lo (mais calibrĂ©es) et oĂč nous bĂ©nĂ©ficions de dĂźners copieux et de nuits confortables.

Je voulais clairement sortir de ma zone de confort, ĂȘtre poussĂ©e dans mes retranchements, subir une difficultĂ© outranciĂšre et tenter de m’adapter… voir ce qui se passait… rhĂŽ et puis, ça n’allait peut-ĂȘtre pas ĂȘtre aussi dur que ça đŸ€·â€â™€ïž

Finalement, Sarah a pu se libérer pour transformer notre duo en trio.

À trois, avec des besoins de sommeil qui seront probablement diffĂ©rents et en dĂ©calage et une mĂ©tĂ©o qui s’annonçait plus fraĂźche qu’espĂ©rĂ©e, nous avons eu un regain de sagesse et j’ai finalement rĂ©servĂ© trois lits au refuge du Treh.

Nous voilĂ  donc avec un objectif Ă  atteindre Ă  l’issue de notre premiĂšre journĂ©e sur le vĂ©lo, le Markstein !

Mais comme rien n’est jamais acquis, notre Marine a malheureusement dĂ» renoncer en derniĂšre minute Ă  prendre le dĂ©part de cette Route des Sagards, trop affaiblie par un Ă©tat grippal 😞

Et le cycliste affaibli a peu de chance de survivre au milieu des routes et sentiers empruntĂ©s par les anciens ouvriers des scieries vosgiennes …

“Les sagards, ces laborieux ouvriers des scieries du massif des Vosges, ont disparu de nos montagnes il y a quelques dĂ©cennies. Mais les routes qu’ils arpentaient autrefois sont toujours lĂ  et, au fond de la forĂȘt, rĂ©sonnent encore leurs voix. À l’image de ces travailleurs infatigables, celui qui s’aventurera sur la route des Sagards devra rivaliser d’endurance et de force, de prudence et d’audace pour achever son Ɠuvre et laisser, une bonne fois pour toutes, son empreinte sur la route.

Un parcours hors des routes ordinaires, une aventure au cƓur de la forĂȘt vosgienne.

VoilĂ  ce qui nous attendait Sarah et moi, Ă  4h52 le matin du mercredi 9 aoĂ»t, au dĂ©part de la maison Ă  8 km et 230m de dĂ©nivelĂ© de la trace… que nous attaquerons au Champ de Laxet, dans la nuit presque noire đŸ€©

Mercredi 9 août 2023

4h52

AprÚs un petit-déjeuner copieux et un bon café, nous voilà parties, tous feux allumés, vers notre trace.

Notre dĂ©part se situe au Champ de Laxet aprĂšs 8 km d’ascension par Berchigranges, une premiĂšre cĂŽte gratos donc, pour s’Ă©chauffer… du hors piste dans la nuit noire.

5h21

C’est parti ! La Route des Sagards a dĂ©marrĂ© ! On nous avait prĂ©venues, depuis le Champ de Laxet, les 100 premiers km seraient les plus faciles.

Effectivement, fastoche jusqu’Ă  Épinal ! Les routes empruntĂ©es me sont connues, mĂȘme si j’y circule habituellement en sens inverse. Ce sont certes de petites routes mais dont le revĂȘtement est trĂšs correct. Profitons-en, il paraĂźt que ça ne va pas durer…

La premiĂšre cĂŽte rĂ©pertoriĂ©e par mon Garmin arrive alors que nous sommes dĂ©jĂ  grandement Ă©chauffĂ©es et qu’au moins deux de nos grands sujets de conversation ont dĂ©jĂ  animĂ©s nos coups de pĂ©dales !

1/32 … voilĂ  ce que m’annonce Garmin. Ah ouais quand-mĂȘme !

Donc jusqu’Ă  revenir au Champ de Laxet demain, quelque part dans la journĂ©e, nous aurons grimpĂ© 32 cĂŽtes … 32 cĂŽtes rĂ©pertoriĂ©es ! Sont Ă©videmment passĂ©es sous silence toutes les cĂŽtelettes jugĂ©es insignifiantes, mais que nous grimperons quand-mĂȘme 😏

Parmi les cols les plus connus, le Col du Singe, le Haut du TĂŽt, le Col des ChevrĂšres, le Col du Haag, le Petit Ballon, le Col du Wettstein, mais jamais de bas en haut par la route que l’on connait !

Naaan, ce serait trop fastoche, et mentalement trop confortable. Il faut passer par tous les murs du coin ! Sans faire le mur Ă©videmment… car si on renonce Ă  suivre la trace au caillou ou au trou prĂšs, on renonce Ă  devenir des Sagardes 😉

Alors on s’y colle !

Notre prĂ©paration organisationnelle fut trĂšs trĂšs lĂ©gĂšre, car finalement la dĂ©cision de partir quand-mĂȘme Ă  l’aventure sans Marin Pogeux a Ă©tĂ© prise la veille du dĂ©part.

Mais, grĂące au travail prĂ©alable de Marine, j’avais notĂ© les points de ravito idĂ©aux.

Eloyes au km 78 : premier arrĂȘt ravito boulangerie.

Mais comme nous n’avions pas encore bien faim, aprĂšs ces kilomĂštres fastoches, le sandwich fut stockĂ© dans la sacoche. Ce fut une erreur de ne prendre qu’un sandwich… mais je ne le saurai que plus tard đŸ„Ž. Ce sandwich fut avalĂ© Ă  11h Ă  Sapois au km 110, fin bien assises sous un abri-bus, aprĂšs la descente de ce qui devait ĂȘtre notre cĂŽte numĂ©rotĂ©e 4/32 …

La deuxiĂšme pause ravito boulangerie Ă©tait programmĂ©e au Thillot, km 190. Soit “seulement” 80 km plus tard. Mais ce que nous n’avions pas concrĂštement pensĂ©, c’est que nous aurions dĂ©jĂ  4500m de dĂ©nivelĂ© positif ! Et nom de Zeus ! Qu’est-ce qu’on nous a fait grimper entre ces deux points de recharge calorique ! PĂŽ pĂŽ pĂŽ pĂŽ pĂŽ …

Des murs qui s’enchaĂźnent avec une indĂ©cence que je n’avais pas imaginĂ©, sur des routes encombrĂ©es ou dĂ©foncĂ©es, sans rendement (donc reposantes ni en montĂ©e ni en descente). À tout-va, des 2 ou 3 km Ă  10% de moyenne oĂč la pente atteignait rĂ©guliĂšrement les 17% – 19% – 22% – et mĂȘme jusqu’Ă  27% !!! đŸ˜±đŸ„”

Bon, seule ma parole compte car mes deux mains Ă©tant nĂ©cessaires sur le cintre, j’ai zĂ©ro photo. Tout comme j’ai zĂ©ro photo des routes dĂ©foncĂ©es car impossible de lĂącher le cintre 😬. Bref, aucun rĂ©pit. Entre les multiples “muroutes” (comprendre mur routes) forestiĂšres qui ont Ă©puisĂ© nos corps, le Pays des Mille Étangs a toutefois rĂ©galĂ© nos esprits. Nous avançons car c’est bien pour ça que nous sommes lĂ . Mais nous n’avançons pas bien vite 😅

Nous en scions (pour ne pas dire que nous en chions) mais c’est bien pour ça que nous sommes lĂ , non … ?

Je suis (dĂ©jĂ ) en pilotage automatique. Je ne listerai pas ces innombrables cĂŽtes que vous aurez plaisir Ă  trouver sur le site : http://routedessagards.fr/creez-votre-site-avec…/la-trace/

Je ne sais plus dans lequel de ces murs, entre Eloyes et Le Thillot, j’ai pris conscience de ça, mais “p*** je n’avais jamais rien fait d’aussi dur !”

Je pioche dans mes poches, une, deux, trois barres d’urgence… au bord de la fringale ! Je suis rincĂ©e ! Mais pas au point de pousser le vĂ©lo, ce qui me rassure un peu.

Nous arriverons Ă  la boulangerie du Thillot au km 190 Ă  17h … le carburant du sandwich de 11h est cramĂ© depuis un bon bout de temps !

Pourquoi ne pas avoir fait de pause ravito plus tĂŽt, me direz-vous ? Parce-qu’il y avait Ă  peu prĂšs RIEN sur notre trace 😅. Et Ă©tant donnĂ© que nous avions dĂ©jĂ  fait de nombreux rab ici ou lĂ  par manque de vigilance et bifurcations inopinĂ©es ratĂ©es, nous avions fait le choix de nous ravitailler Ă  moins de 500m de la trace.

À ce moment-lĂ , j’aurais dĂ©vorĂ© tous les rayonnages ! Finalement, un petit pĂątĂ© (pĂątĂ© lorrain pour les non connaisseurs), deux wraps, une part de tarte aux pommes et trois Ă©normes sablĂ©s aux amandes et raisins feront mon bonheur. Idem pour Sarah Vieuille. Comme quoi on Ă©tait vraiment en phase 👌

Soyons lucides, le troisiĂšme point de ravito, prĂ©vu Ă  Kruth Ă  condition d’y ĂȘtre avant 19h, est dĂ©finitivement hors sujet. Donc nous stockons le petit pĂątĂ© et deux sablĂ©s dans la sacoche, pour plus tard…

L’objectif est dĂ©sormais d’arriver avant 23h au refuge du Treh, au sommet du Markstein (officiellement au km 265) oĂč nous attend le gardien. Ça devrait le faire. Mais il ne faut pas s’amuser en route. Et il faudra encore trouver Ă  manger, hors boulangeries ou supĂ©rettes qui seront fermĂ©es, car les rĂ©serves faĂźtes ne suffiront pas pour le dĂźner et le petit-dĂ©jeuner.

Nous visons Fellering, pied de la derniĂšre ascension avant le refuge. Le ventre plein et les ascensions plus longues et moins raides nous donnent un regain d’Ă©nergie. Ça pĂ©dale mieux ! On reprend nos conversations.

Il est 20h au sommet du Bramont. Petite pause recharge montre GPS et recharge vestimentaire. Ça va cailler ! Nous voilĂ  prĂȘtes pour une longue descente vers Kruth puis Fellering, oĂč nous misons sur un petit resto ou une pizza Ă  emporter.

La descente sera moins longue qu’imaginĂ©e car nous bifurquons, pour la 127Ăšme fois đŸ€Š vers des petites routes interdites aux voitures puis de la piste cyclable. C’est pas encore lĂ  qu’on va rĂ©ussir Ă  hausser notre vitesse moyenne 🙃

Fellering. Km 245. Presque 21h.

Nous entrons dans ce petit resto et demandons le plat le plus rapide. Ce sera Burger-frites et eau pĂ©tillante ! Pour moi, Munster, lard, steak hachĂ© pour un burger gourmand 😋

Recharge compteur GPS par la mĂȘme occasion, histoire que tout le monde reparte gonflĂ© Ă  bloc.

Petit appel tĂ©lĂ©phonique au gardien, qui nous attend, pas de souci ! Bien, nous ne dormirons pas dehors cette nuit, mĂȘme si nous arrivons hors dĂ©lai… Reste l’ascension du Markstein par le Col du Haag (12 km Ă  7%), que nous ferons de nuit. L’ascension n°19/32 …

J’aime beaucoup rouler de nuit. Seule la vue est gĂąchĂ©e. Le reste semble galvanisĂ©. Le revĂȘtement semble parfait, dommage qu’on ne le voie pas nettement pour en profiter davantage.

Je nous pensais presque arrivĂ©es, c’Ă©tait sans compter sur ma piĂštre connaissance gĂ©ographique des lieux… Au sommet, restait 4 km pour rejoindre le Markstein, puis environ 2 km pour tomber sur le refuge… sauf que suite Ă  notre prĂ©paration organisationnelle trĂšs lĂ©gĂšre, j’ai Ă©tĂ© nĂ©gligente sur la situation exacte du refuge, me disant qu’on s’arrĂȘterait pour regarder au moment venu et que de toute façon, ce serait bien indiquĂ©. Eh ben non, malgrĂ© un arrĂȘt GPS et un appel du gardien qui s’inquiĂ©tait, j’ai merdĂ©, on a ratĂ© la bifurcation et encore un peu, on redescendait sur Kruth đŸ€ŠđŸ€Ł J’Ă©tais gelĂ©e !

Bref, nous avons fini par rejoindre le refuge aprÚs 30 minutes de jardinage, accueillies chaleureusement par le couple chargé de la surveillance.

275 km et prÚs 6500m de dénivelé positif.

Une apprĂ©ciable infusion partagĂ©e, quelques explications sur notre pĂ©riple, de nombreux et sincĂšres remerciements, une bonne douche et un lavage de dents indispensables, et nous Ă©teignions la lumiĂšre Ă  0h50 … avec un rĂ©veil Ă  5h15.

J’ai des tensions musculaires, asymĂ©triques Ă  droite et Ă  gauche, comme je n’ai jamais ressenti Ă  vĂ©lo. J’ai le dos et l’entre-omoplates endoloris Ă  force d’ĂȘtre crispĂ©e dans les descentes dĂ©foncĂ©es.

La courte nuit aurait cependant pu ĂȘtre super rĂ©paratrice si j’avais dormi … mais impossible de trouver le sommeil ! Si j’ai somnolĂ© deux ou trois fois quelques secondes, c’est bien le maximum. Mais mon corps allongĂ© a pu se refaire la cerise, tout n’Ă©tait pas perdu 😉

Jeudi 10 août 2023

5h15

Debout, nous faisons le point sur le sĂ©chage des vĂȘtements, la recharge des multiples GPS et lumiĂšres et prenons notre petit-dĂ©jeuner sans lumiĂšre, n’ayant pas rĂ©ussi ni l’une ni l’autre Ă  mettre la main sur l’interrupteur en cuisine.

Pas grave, ça fait moins mal aux yeux. Petit pùté et sablé amandes et raisins !

6h10

C’est reparti. Il reste 145 km (un peu plus si on rate des bifurcations, ce qui sera encore le cas…) et environ 4000m de dĂ©nivelĂ© positif. On a fait le plus dur, en terme de murs. Mais… Cette deuxiĂšme journĂ©e sera bien diffĂ©rente de la premiĂšre, mais restera difficile.

AprĂšs une descente que l’on espĂ©rait plus longue, nous voilĂ  reparties sur les traces des Sagards, en pleine forĂȘt, sur des routes qui seront encore plus dĂ©foncĂ©es que la veille. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, des pourcentages moins forts mais des ascensions plus longues.

Le point commun avec la veille, c’est que le plat n’existe pas et que les montĂ©es s’empilent les unes derriĂšres les autres sans aucune bienveillance đŸ€Ș

Tandis que les descentes me congĂšlent ! Je me demande comment je vais rĂ©ussir Ă  ne pas ĂȘtre malade aprĂšs ça … (eh bien finalement, je ne le serai pas 👌).

9h30. Km 325.

Ravito Ă  Munster. À priori le dernier. Nous prenons de quoi manger tout de suite, et de quoi casser une petite graine plus tard. Le petit pĂątĂ© et le sablĂ© nous ont bien calĂ©es, mine de rien.

Nous arrivons dĂ©sormais sur des routes que nous connaissons. Enfin, c’est ce qu’on croit ! Mais Ă  nouveau, nous avons droit Ă  ces petites bifurcations sorties du chapeau qui nous emmĂšnent dans des cols connus par des voies inconnues et toujours ascensionnelles !

J’ai fini par rĂąler. Pendant tout un col. Ouais. Mais rien Ă  voir avec la trace. Le Col du Wettstein qui aurait dĂ» ĂȘtre trĂšs sympa Ă  grimper, Ă©tait criblĂ© d’une couche d’une Ă©paisseur et d’une grosseur de gravillons que je n’avais jamais vu sur une route ! 😡 Alors lĂ , j’avoue, ça m’a bien gonflĂ© ! Aucun rendement, pas moyen de se mettre en danseuse, bon ni pour les pneus ni pour le cadre, stress au milieu des voitures, … bref j’ai rĂąlĂ© toute la montĂ©e … sauf dans les virages qui Ă©taient Ă©pargnĂ©s, pour des raisons de sĂ©curitĂ©.

C’est drĂŽle mais Ă  partir de Plainfaing (km 365 Ă  13h45), alors que nous sommes si proches de chez nous, je trouve cette route des Sagards interminable !

La raison ? Parce-qu’on prend des “routes” dĂ©foncĂ©es qui nous font faire des dĂ©tours de dingue (par rapport Ă  l’itinĂ©raire le plus court pour rentrer Ă  la maison đŸ€Ș).

Il fait plus chaud que la veille, ce qui va réveiller certaines gÚnes voire douleurs de pied chez Sarah et moi. Chacune son pied droit qui merdouille.

Les routes sont vraiment bien dĂ©foncĂ©es. J’ai mal aux poignets et au mains dans les descentes. Arrive la montĂ©e de Serichamp. Pour la deuxiĂšme fois, je m’entends penser que “p*** je n’avais jamais rien fait d’aussi dur !”.

Je parle du périple dans sa globalité. Et ça fait deux fois.

Donc je valide ce constat : la Route des Sagards est l’aventure Ă  vĂ©lo la plus difficile que j’ai faite !

Pourtant lĂ , je ne suis pas en fringale. Je suis juste crevĂ©e. J’en ai marre de grimper. Ce fut pour moi la derniĂšre difficultĂ© endurĂ©e. Une fois arrivĂ©e Ă  Xonrupt, j’Ă©tais sur mes terres et je connaissais par cƓur les derniĂšres difficultĂ©s. Il en restait 3/32 ! De la rigolade !

C’est donc l’esprit lĂ©ger que nous avons rejoint GĂ©rardmer par le Poli et la route des 17 km, puis Liezey par les Xettes.

Des bonnes grimpettes mais qui, avec leur statut de derniĂšres des 32, passent bien.

AprĂšs Liezey comme prĂ©vu, nous retrouvons mon papa et mon neveu sur le vĂ©lo, venus Ă  notre rencontre (sans assistance ravito, on est pas des tricheuses ! 😆).

Le Champ de Laxet ! 17h35. Km 414. 10 277m de dénivelé positif

Nous y sommes ! Enfin ! En 36h15 !

Je ne rĂ©alise pas trop…

Photos souvenirs, Ă©videmment !

Et descente vers la maison. La maison. 17h52. 430 km. 10 500m de dénivelé positif

Nous y sommes, enfin, 37h aprÚs notre départ.

La biÚre et le gùteau encore tiÚde de ma maman, dégustés en terrasse au milieu de mes proches et en compagnie de mon acolyte de dingue, furent appréciés à leur juste valeur.

Je voulais de l’inconfort, j’en ai eu !

Je voulais une difficultĂ© durable et dĂ©rangeante, je l’ai eue !

Je voulais de l’incertitude, j’en ai eue !

Je voulais une aventure, rude, mythique et mĂ©morable, je l’ai eue !

Nous sommes les premiÚres femmes Sagardes à vélo !

Alors merci Simon Remy d’ĂȘtre Ă  l’origine de cette Ă©normissime trace, merci Ă  Sarah d’ĂȘtre toujours partante pour les pires trucs, et merci papa maman pour les encouragements et le plein d’Ă©nergie avant et aprĂšs

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Les finisseurs !

[ Nous sommes de Ceux ]

par BenoĂźt Gandolfi, finisseur de le Route des Sagards en 23 h 05 min.

« Nous sommes de ceux qui ne renoncent pas.
Nous sommes de ceux qui Ă©tablissent des stratĂ©gies dans l’obscuritĂ©.
Pour reprendre la main, jouer selon leur propres rĂšgles et forcer le destin.
Nous sommes de ceux qui ont en assez de leur propre férocité.
Nous sommes de ceux qui veulent Ă  tout prix tabasser leur part d’ombre. »

Fauve

Ces quelques vers piochĂ©s dans une chanson de Fauve, reflĂštent assez bien mon Ă©tat d’esprit Ă  l’aube d’attaquer pour la seconde fois la Route des Sagards.

Vous savez, cette trace d’environ 400 bornes et 10000 mĂštres de dĂ©nivelĂ© positif qui sillonne le massif des Vosges, et qui, en novembre dernier avait eu le dernier mot.

De l’eau a coulĂ© sous les ponts depuis, le corps et l’esprit ont encaissĂ© des Ă©preuves. Les stigmates du 24h sont toujours prĂ©sents, ses enseignements Ă©galement.

Nous reformons un trio original pour bourlinguer jusqu’à l’ivresse.

Vincent et StĂ©phane, les deux forts gaillards de Sapois. Et moi, le petit gars de Liezey. Dans ce genre d’épopĂ©e, pas besoin de dresser le pedigree de chacun. On fait table rase du passĂ©. Chacun vient avec ses armes. Chacun vient avec sa cause. Chacun sait pourquoi il est lĂ .

La suite de l’aventure, c’est un enchaĂźnement de pentes, un enchaĂźnement de surfaces, un enchaĂźnement d’émotions. Car avant toute chose, rendons hommage au crĂ©ateur. Il faut forcĂ©ment ĂȘtre habitĂ© d’un esprit marginal et destructeur pour ĂȘtre Ă  l’origine de cette Route. Simon Remy doit certainement faire partie de ceux-ci. Ces marginaux qui s’intĂ©ressent davantage au voyage plutĂŽt qu’à la destination.

Ceux qui prĂ©fĂšrent le voyage en train plutĂŽt que l’avion.

Car il faut se l’avouer, rien n’est logique dans cette Route. DĂšs que le tracĂ© nous dĂ©roule un beau tapis propre, c’est le moment de bifurquer. Chercher le grain rugueux, le nid de poule, l’avancement minimum.

Photo : Anthony Pouille.

Et c’est certainement pour toutes ces raisons que nous sommes partis de Sapois ce mercredi 16 AoĂ»t Ă  06h07 du matin. Pour se confronter Ă  la difficultĂ©, Ă  l’ñpretĂ© de l’homme en mouvement.

Et comme rien ne peut ĂȘtre linĂ©aire dans ce genre d’avancement, nous nous sommes vite retrouvĂ©s seuls. Une crevaison, des crampes prĂ©coces, une chaleur de plomb. L’aventure collective du dĂ©but cĂšde vite la place Ă  une aventure individuelle intĂ©rieure.

DĂ©sormais un seul mot d’ordre : Avancer. Grappiller les kilomĂštres. Surfer sur les bonnes sensations avant le coup de bambou qui te fera ramper dans le fossĂ©.

De fil en aiguille, de cols en montĂ©es, me voilĂ  seul dans la nuit. DĂ©jĂ  280 kilomĂštres au compteur. Quasiment 8000 de positif. Mon rythme de forçat m’a empĂȘchĂ© de voir les kilomĂštres dĂ©filer. Mais maintenant nous y sommes. La nuit pointe le bout de son nez. La concentration doit forcĂ©ment se faire plus marquante. Le sauvage reprend ses droits. Les bĂȘtes sortent du bois. Je m’amuse Ă  les appeler. Elles viennent Ă  moi. La beautĂ© froide de la biche dans la montĂ©e du Vic, le regard glaçant du renard au dessus du Poli, l’envolĂ©e lyrique de la hulotte aux abords du HautrĂ©. Je suis dans mon Ă©lĂ©ment. La voĂ»te cĂ©leste sublime le tout pour faire de cette nuit un tableau.

Une pause salvatrice kilomĂštre 292 me permet d’entrer dans la derniĂšre ligne droite frais et ragaillardi. Je suis dĂ©sormais sur le chemin du retour. Chaque aventure se joue sur un coup de dĂ©s. Une faute d’inattention, peut ĂȘtre mĂȘme les prĂ©mices d’un endormissement et me voilĂ , sur ma bĂ©cane, en train d’heurter Ă  pleine vitesse un trou bĂ©ant dans la chaussĂ©e. Les deux chambres Ă  air explosent en mĂȘme temps. Je tiens comme par miracle sur ma monture, Ă©quilibriste noctambule.

La rĂ©paration s’opĂšre dans la difficultĂ© et les minutes s’écoulent.

DerriĂšre moi, je vois le halo d’une frontale. StĂ©phane est lĂ , fonçant Ă  vive allure, Ă©vitant sans encombre le trou dans lequel je viens de me fracasser. Il poursuit sa route comme j’ai poursuivi la mienne bien plus tĂŽt dans la journĂ©e.

Ma bicyclette est à nouveau en état de marche, je remonte dessus. Sonné. Comme un boxeur dans les cordes, le regard hagard.

La Route est encore longue et il faudra bien de la vigilance pour arriver Ă  bon port.

L’esprit a cette merveilleuse capacitĂ© de se remobiliser quand il le faut.

J’enchaĂźne Ă  nouveau les kilomĂštres. Je suis dans la plaine, grisĂ© par la vitesse. Je passe Epinal, ma ville natale, sans me retourner.

C’est dans le Fossard que la pente s’élĂšve Ă  nouveau pour une derniĂšre fois. Et comme dans les meilleurs contes pour enfants, vous savez oĂč tout se termine toujours trĂšs bien, je retrouve Stephane dans l’une des derniĂšres montĂ©es.

Photo : Anthony Pouille.

Cela fait des heures que nous pĂ©dalons et nous voilĂ  au mĂȘme point. Un dernier effort en commun, une derniĂšre descente Ă  pleine vitesse et nous devinons enfin le village de Sapois.

Nous sommes jeudi 17 Août. Il est 5h12 du matin.

Nous sommes de ceux qui en avons scié.

Nous sommes de ceux pour qui la Route des Sagards a été une épopée de 23 heures et 05 minutes.

PS : Vincent terminera quant Ă  lui La Route des Sagards en 28h55 au terme d’une lutte acharnĂ©e. Évidemment.

Benoit Gandolfi (publié initialement sur ses réseaux) https://www.facebook.com/benoit.gandolfi

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Les finisseurs !

La RDS Ă  Joe (et Dany et PA)

RĂ©cit publiĂ© Ă  l’origine sur la page Facebook de Joe Biringer, Sagard du 3 juillet 2023. Une histoire Ă  lire avant de se lancer (ou pas) dans l’aventure. Ils en ont sciĂ© !

PrĂ©venez vĂŽtre employeur car il y a un peu de lecture et il est possible d’ĂȘtre obligĂ© de poser un RTT..

La route des sagards c’est dĂ©couvrir ton quartier autrement que par les trottoirs et ruelles bien Ă©clairĂ©es.

Oui en effets les Vosges, la Haute-SaĂŽne, l’Alsace ce sont des coins vu, revu et re re revu et pourtant, j’ai quasi dĂ©couvert les 400kms de cette boucle extraordinaire.

Cette boucle c’est :

396kms

10000D+

98% de route / 2% de chemin

98%de route oui, Mais faut voir l’Ă©tat ! 😅.

La route des sagards c’est un dĂ©lire complĂštement diffĂ©rent de mes prĂ©cĂ©dents dĂ©fis et forcĂ©ment, il a fallu s’y prĂ©parer.

La route des sagards c’est une trace GPX Ă  suivre, ne pas en sortir ou alors oui mais revenir au point oĂč on l’a quittĂ©e pour ensuite continuer ( boulangerie / courses /pharmacie).

Quelques heures de selle plus tard nous y voilĂ .

Jour J ! Prise du départ avec Pierre-andre et Danny.

Nous choisissons eloyes pour lieu de dĂ©part car oui la route des sagards c’est une boucle qui commence officiellement Ă  Épinal mais qui peut ĂȘtre dĂ©butĂ©e n’importe oĂč sur la trace du moment que la boucle est bouclĂ©e ( tout le monde suit ?)

PremiĂšre matinĂ©e sympa, le rythme est bien la vue est belle et les cols s’enchaĂźnent bien..

Col de morbieux, dans la descente nous sommes bloquĂ©s par une spĂ©ciale de rallye et malheureusement les routes proche sont Ă©galement lieu de passage de la spĂ©cial, ça nous fait faire demi-tour , dans la descente Danny crĂšve de l’arriĂšre et P.A de l’avant, je change leurs chambres Ă  air et nous voilĂ  Ă  contourner le merdier.

Pause repas et retour en selle, le temps change et la flotte arrive, les premiĂšres gouttes sont plutĂŽt bienvenue car ça rafraĂźchit…. Pi en fait ça tourne Ă  la pluie fine, perçante, ça dure 5h, tout ça, sur la partie haut de SaĂŽne et les joyeux cols.. Je prend d’ailleurs un coup de bambou dans le dernier..

Danny est dĂ©motivĂ© grave, le belge est fort, mais le belge n’aime ni l’eau ni le froid.. Danny veux plier bagage… Il peste, il avance mais il peste 😅.

ArrivĂ©es au thillot en dĂ©but de soirĂ©e, trouvons un kebab pour manger et rĂ©flĂ©chir Ă  la suite, car oui partir Ă  3 c’est 3 avis, c’est 3 ressentis, c’est 3 physiques, 3 mentals et mon idĂ©e de dormir 1h dans un arrĂȘt de bus avant d’attaquer la nuit ne fait pas l’unanimitĂ© ( va savoir pourquoi đŸ€·â€â™‚ïžđŸ˜‚)

La pluie cesse mais la nuit semble ĂȘtre humide.

AprĂšs le repas, sur la trace il y a 2 auberges a bussang, la premiĂšre ne fait que restau, la seconde semble fermĂ©e, l’hĂŽtel en face fermĂ© et 170balles la nuit pour se changer et fermer les yeux 1h non merci ( et puis c’est loin du but de cette aventure) Danny tourne dans le quartier et tombe sur une dame qui sort ses chiens.. Nous posons la question pour une Ă©ventuelle auberge dans le coin, elle propose son garage puis son camping car garĂ© devant.(puis son lit pour Danny) . Il est 22h30 et faut pas trop rĂ©flĂ©chir… OK Carole (et non “OK corral” pour ceux qui on la rĂ©f)

Camping car, 23h00, mise du reveil a 1h15!

Sonnage de carillon mais L’ours grogne un “hummmm trop tĂŽt !”, le belge entend la pluie et le vent donc fait le mort 😅.

Second rĂ©veil 2h => đŸ˜ŁđŸ„±đŸ˜«đŸ‘č

TroisiĂšme rĂ©veil 2h45 personne n’a ouvert l’Ɠil ni mĂȘme grognĂ© (sont dĂ©cĂ©dĂ©s les amis ?) 😅

Perso j’ai fermĂ© les yeux une bonne heure.

4h ça emerge, j’annonce direct la mĂ©tĂ©o ce qui motive Danny Ă  continuer un peu ( si jamais il flotte d’ici 1h je sent que je vais me faire engueuler dans un dialect belge que je ne saurais comprendre 😂😂)

Carole paye son cafĂ© et let’s go.

8h30 P’tit dej Ă  oderen dans la boulangerie la moins accueillante d’Europe (Ă  la hauteur du cafĂ© servi et de la ficelle au lard posĂ©e la depuis dĂ©but juin probablement !) chaque aliment devrait ĂȘtre accompagnĂ© d’un gaviscon !

Retour en selle avec un des morceaux annoncĂ© difficile, la montĂ©e du Haag 12kms 940D+ avec des passages Ă  15% mais un revĂȘtement neuf… Finalement il est passĂ© crĂšme celui lĂ ..

Plusieurs cols et difficultĂ©s plus tard nous voilĂ  Ă  linthal, charmant village alsacien, une auberge en bord de route fera l’affaire pour bien manger juste avant la prochaine grosse sĂ©rie de cols

Les tenanciers doivent ĂȘtre cousin avec la boulangerie d’oderen… Bordel l’accueil 🙄

Bref montĂ©e du petit ballon, plein cagnard, ça laisse un max d’Ă©nergie et Ă  ce moment, ma vie perso me met dans le mal, mes Ă©motions me font craquer, faut vite faire le vide… À l’arrivĂ©e au sommet, pendant que les amis rĂ©cupĂšre je roupille quelques minutes.. la descente emprunte 3 kms de chemins puis le col du firstplan 😍 un rĂ©gal .. AprĂšs la rĂ©cup de P.A qui a zappĂ© de tourner en bas, nous revoilĂ  sur le bon chemin et… Danny lĂąche un “Ooohhhh noonnnn” crevaison sur la route la plus belle du monde 😂

Je change sa chambre+ pneu et zou faut y aller, Ă  noter qu’Ă  l’heure lĂ , normalement aurions dĂ» ĂȘtre proche de l’arrivĂ©e et que la dite arrivĂ©e Ă©tait encore biieeeeennnnn loin.. Ça sent la seconde nuit dehors (enfin la premiĂšre n’a pas Ă©tĂ© traumatisante)

Ça monte, ça descend et arrivons Ă  munster ou la, tout deviens particulier, des gens promĂšne des girafes, Danny notre belge de l’aventure commence Ă  parler marseillais Ă  la deuxiĂšme biĂšres , le repas met 1h a arriver… Bref le couchĂ© de soleil sur le sommet le plus proche semble compromis (c’est con mais c’est ce genre de dĂ©tails qui t’apportes parfois l’Ă©nergie dont tu as besoin)

Repas fini direction le sommet du wintebfhskfbdkfein machin chose.. Le jour nous quitte et laisse place Ă  la pleine lune..

Lac noir, lac blanc, mer du nord, Antarctique, sieste de 5minutes a mĂȘme le sol en haut d’un col et descente qui nous emmĂšnera Ă  1h du matin devant l’auberge du fer Ă  cheval dans le col du bonhomme..

P. A est bien entamĂ© et l’irritation des baloches lui puise de l’Ă©nergie… La fatigue gĂ©nĂ©rale prend le dessus, faut pas chipoter, faut faire une pause et celle-lĂ  est essentielle car vu l’Ă©tat, rouler de nuit est suicidaire. Il s’Ă©croule au sol..

Miracle, Olivier (pas celui de carglass hein) nouveau parton de l’auberge est en plein boulot nocturne ( l’enduit, la prise, le carlage, la plomberie, Oliver est un homme multitaches, Ɠnologue Ă  ses heures perdues il saura vous accueillir d’ici quelques jour Ă  l’ouverture officiel) en attendant il a du taf le copain..

Il nous met bien, boisson fraĂźche, paillasse et surtout un peu de chaleur humaine

Sieste a 1h30 (j’ai fermĂ© les yeux 45′ et aprĂšs j’Ă©coutais Olivier bricoler dans la cuisine… Bruit de mixeur,perceuse, canette, spatule….)

Il est donc maintenant 3h , Olivier paye son cafĂ© et hop vĂ©lo, P. A est de nouveau dans le game đŸ’Ș😍 motivĂ© comme a la premiĂšre minute đŸ€©.

La, le parcours Ă©tait la partie qui m’a semblĂ© le plus merdique de toute la boucle aprĂšs coup.. Dans un petit hameau, des routes partout, plus pourav les unes que les autres, la trace GPX Ă©tant pourtant hyper prĂ©cise, tous les 3 mĂštres il y a une ruelle, une entrĂ©e de garage, un chemin ect… Et visiblement le budget voirie n’a pas dĂ©passĂ© les 20francs (voir ancien franc) et depuis, plus rien..

Une montĂ©e difficile puis une descente difficile on mis Ă  mal nos corps et P.A qui s’Ă©tait s’Ă©tait Ă  peine refait la cerise reprend un gros coup de pas bien, ça fait mal de le voir comme ça, sans rentrer dans les dĂ©tails il est transparent, creusĂ© mais combatif depuis de longues heure et ça, c’est plus que respectable 🙌

AprĂšs la pause un morceau bien raide nous emmĂšne jusqu’au levĂ© du jour

Sommes Ă  ban-sur-meurthe et le bout qui arrive suscite l’interrogation de P. A, et si l’abandon devenais une option presque essentiel, perso je sais qu’il peux aller au bout mais il reste 120kms et mĂȘme si la fin ne comporte pas de grosses difficultĂ©s faudra quand mĂȘme tourner les jambes..

Autre avis de ma part, un corps usĂ© est un corps qui se blesse, vous savez, pas la douleur de l’effort, mais bel et bien cette blessure, celle que tu traĂźnes des mois… En temps qu’ami ça fait mal de lui dire mais, il est l’heure pour lui de dire stop…car la seule chose pour sauver les meubles Ă  cet instant c’est 10h de sommeil, alimentation tip top, massage et soins du corps..

Il est 5h30 et P.A coupe sa montre 😔 et se laisse glisser doucement vers arnould ou Cindy viendra le rĂ©cupĂ©rer..

Danny et moi savons que la montĂ©e suivante s’annonce hard Ă©galement et que malgrĂ© notre bonne forme, mieux vaut gĂ©rer et y aller cool que de cramer nos cartouches bĂȘtement..

Arrivons à gerardmer pour le petit déjeuner, Danny est dans le dur, les jambes sont raides, il reste 70kms..

Perso j’ai une trĂšs bonne forme physique et mentale, mes entraĂźnements depuis janvier ciblĂ© sur ce dĂ©fi font que j’arrive Ă  gĂ©rer, le rythme jusqu’Ă  la n’a pas Ă©clatĂ© ma prĂ©pa, j’avais de la marge mĂȘme si certains cols m’ont fait souffrir, c’Ă©tait ponctuel et Ă©galement parce que les planĂštes se sont alignĂ©s pour moi..

Quittons gerardmer avec une montĂ©e longue, trĂšs longue mais le pourcentage est soft, pas de vilain coup de cul, c’est rĂ©gulier, il suffit de ne pas vouloir aller trop vite et ne pas tomber dans ce piĂšge du “ça roule donc j’appuie”

Arrivons sur Épinal, il reste 25kms dont 18 de lĂ©ger faut plat montant, une belle bosse et un dernier mur, avec un passage Ă  20%..

Danny s’accroche, ça fait dĂ©jĂ  50kms qu’il est dans ma roue, les 25 suivant vont passer pareil.

Arrivés à jarmenil, avant derniÚre bosse, 2,5kms à 5% , il gÚre, je le motive.

DerniĂšre descente sur eloyes…

L’arrivĂ©e est Ă  2kms dont 1,5kms bien hard

Je laisse Danny a l’angle de la rue et je donne tout, le sang dans la bouche pour cette ultime montĂ©e, la finir au sprint juste pour le fun aprĂšs 420kms..

Je passe le mur, ça relĂąche un peu et je vois P.A qui nous attend 😍😍😍 je donne tout et bordel je fini cette boucle des sagards, Danny arrive peu aprĂšs et sommes obligĂ©s de l’arrĂȘter, il allait repartir pour un second tour 😂

Biùre au soleil chez P.A et Cindy avant de se dire à trùs vite 😍

La route des sagards c’est oublier un instant les emmerdes de la vie, c’est penser fort Ă  ceux que t’aimes , la route des sagards te remet bien Ă  ta place, la route des sagards c’est l’histoire d’un homme qui a partagĂ© un morceau d’histoire en le couchant sur une feuille et qui a donnĂ© vie Ă  ce parcours hors normes, sans mentir sur la difficultĂ© ni sur la beautĂ© de l’Ă©preuve.

Bilan

RĂ©sistance

-Physique 8/10 (le cul un peu entamé et parfois un manque de force musculaire )

-Mental 8/10

-matériel 10/10, avec du matos bas de gamme

Merci à Pierre-andre , Danny pour le chemin à leurs cÎtés

Merci Ă  Simon Remy / La Route des Sagards

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Les finisseurs !

NEW WORLD RECORD

Les frĂšres Falentin sont partis Ă  l’assaut de la Route des Sagards ce lundi 8 mai 2023. AprĂšs deux journĂ©es sur la route et une derniĂšre aprĂšs-midi trĂšs pluvieuse, ils ont bouclĂ© la boucle en 34 heures et 48 minutes, Ă©tablissant ainsi un nouveau record de l’Ă©preuve ! Bravo Ă  eux !

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Les finisseurs !

Yannick Lehmann, 1er sagard à vélo

Parti vendredi 7 avril à 17h, Yannick a bataillé pendant plus de 35 h 28 minutes pour venir à bout de la Route des Sagards.

Nous avons pris des nouvelles de notre 1er sagard et recueilli ses impressions :

La trace est magnifique, tranquille Ă  l’abri de la circulation, mais vraiment pas roulante sur les routes forestiĂšres raides et dĂ©foncĂ©es. Je ne connaissais pas trop la route Ă  partir du PrĂ©-des-Raves, jusqu’au pied de la chaume de ventron 😁. J’Ă©tais dĂ©jĂ  passĂ© de l’autre cĂŽtĂ© de la montagne et je savais que c’Ă©tait un sacrĂ© terrain de jeu avec les petites routes avec vues et coup de culs. Mais lĂ  c’Ă©tait un festival !

Quel est pour toi ton pire moment ?

Le pire, ce sont les bosses raides avant Bussang. En gĂ©nĂ©ral je suis joueur. Mais cuit, avec un vĂ©lo chargĂ©, ça ne passait plus… Le Haag me faisait un peu peur car j’ai dĂ» le garder pour la fin Ă  cause de la neige au dĂ©part. Mais finalement ça a Ă©tĂ©. C’Ă©tait la derniĂšre et je suis montĂ© tranquille Ă  pied en prenant mon temps 😁.

Et ton meilleur moment ?

Le mieux, je dirais la voie verte avant Bussang đŸ€Ł. Sinon le plateau aprĂšs GĂ©rarmer a l’air magnifique. De nuit avec la lune et le brouillard c’Ă©tait magique !

La partie vers les Milles Etangs aussi oĂč la route est enfin un peu vallonnĂ©e et roulante le long des Ă©tangs.

Encore bravo Ă  Yannick pour avoir inaugurĂ© cette trace ! À qui le tour maintenant ??

Qui sera le premier sagard à vélo ?

AprĂšs une annĂ©e de reconnaissances, la trace dĂ©finitive est dĂ©sormais disponible. Il ne reste plus qu’Ă  s’y aventurer et tenter de boucler la boucle. On vous attend et on hĂąte d’avoir vos impressions. Une seule chose est sĂ»re, vous allez en scier !